Quelle est la concrétisation de la joie selon le judaïsme?

Par le rabbin HaïmTorjman

Il est dit que l’on doit « servir Hachem dans la joie ». La joie est en effet un « condiment » indispensable dans la vie d’un être humain. Les lettres qui composent « Besimha » (dans la joie) sont d’ailleurs les mêmes que celles de « Mahachava » (la pensée). C’est donc dans la pensée que doivent s’exprimer les prémices de la joie. Simha, c’est aussi les lettres qui constituent Hamicha, le chiffre cinq. La joie s’exprime donc aussi à travers les cinq sens. Dans le judaïsme, la vraie joie est celle qui s’exprime dans 1’accomplissement des mitsvot. Toutes les joies de ce monde sont en effet éphémères et précaires alors que la joie de la mitsva apporte un contentement véritable car la mitsva accomplie avec joie reste éternelle.

On voit dans les Pirkei Avot (Maximes des Pères) qu’il est dit que « l’on doit recevoir tout un chacun avec affabilité ». L’hospitalité doit donc se faire avec une certaine bonhomie. On doit aussi accomplir les mitsvot avec Hitlaavout, c’est-à-dire avec enthousiasme. Il y a donc là aussi cette expression de la joie.

En ce qui concerne Souccot, on retrouve cette notion à travers les phrases telles que «Zeman Simhatenou » (Le temps de la joie) ainsi que «Vesamahta Lifnei Hachem EloKeha » (Tu te réjouiras devant l’Eternel ton D.ieu). Pour exprimer cette joie à la fête de Souccot, il y a deux grandes mitsvot qui sont la Soucca et les quatre espèces (loulav).

Un des Midrachim explique qu’à Pessah, l’homme est encore inquiet au sujet de la récolte, puisque tout est sur pied et que l’on craint les vicissitudes et les intempéries. A Chavouot, il y a un début de récoltes. Ces prémices provoquent donc une première joie. Cette joie atteint son point culminant au moment où l’on engrange, c’est-à-dire à Souccot. Les inquiétudes de l’homme disparaissent donc et celui-ci peut exprimer sa joie et son bonheur, ainsi que remercier D.ieu de lui avoir octroyé la bénédiction qui lui a été dévo1ue. On dit que la Soucca est aussi la joie car elle exprime le fait que Dieu a protégé les enfants d’Israël dans le désert.   

La Soucca rappelle le lien particulier qui unit D.ieu à l’Hom- me. C’est une protection rapprochée que D.ieu a réalisé et qui place l’ensemble du peuple juif sous la même bannière.

On dit aussi «Etends sur nous la soucca  de paix » (souccat chalom) car c’est grâce  aux mérites d’Aaron que les enfants d’Israël ont eu les nuées de gloire; Aaron aimait en effet la paix et la poursuivait. Et  dès l’instant ou il y a la paix, il y a aussi la  joie puisque la joie jaillit des lors que  l’homme est dégagé de tout souci.

Nos sages disent que c’est à  travers la consommation de viande et de  vin que cette joie doit se manifester pendant les fêtes. C’est aussi par la tenue vestimentaire que l’on doit trouver l’expression de cette simha. Ce sont là ses aspects  extérieurs auxquels il convient d’ajouter  le fait d’offrir un cadeau à son épouse et à  sa maisonnée.   

Le fait d’apprêter sa maison et  sa table en l’honneur de la fête constitue un moyen d’exprimer sa joie et de ressentir l’atmosphère de la fête. On peut aussi chanter le Hallel, comme ou le fait à Pessah pendant que l’on construit la soucca.  Le Hallel est composé de textes de Téhilim qui expriment des louanges à D.ieu.  On le récite à Yom tov ainsi qu’à Roch  Hodech et à tous les moments où cette  joie doit être exprimée devant D ieu. Concernant Souccot, il est dit également: «Tu prendras les quatre espèces et tu te réjouiras devant D.ieu ». Cette réjouissance  provient du fait qu’il était coutume, lors  de Souccot, d’aller en pèlerinage à Jérusalem. Le fait d’effectuer ce pèlerinage et la  mitsva qu’il représente étaient aussi source de joie.

Regardons le mot  Ich, Homme, qui est composé des lettes  alef, youd et chine et qui exprime les trois  dimensions du service divin. Le alef renvoie à ahava (l’amour), le youd à yira (la  crainte) et chine à Simha, (la joie). Or,  qu’avons-nous fait ? A Roch Hachana,  nous avons toute la crainte du jugement.  A Kippour, nous avons tout l’amour de  Dieu qui se manifeste. Et à Souccot, c’est  la simha, la joie et donc la synthèse entre  l’amour et la crainte.